Je n’avais jamais lu de roman d’Anne-Laure Bondoux. Ce n’est donc pas
son nom qui m’a poussé à me précipiter sur ce roman dès que je l’ai reçu.
C’était sa couverture. Définitive non, mais déjà magnifique. C’était sa
quatrième de couverture, attirante, intrigante. C’était, enfin, la lettre de
l’auteure qui accompagnait le roman. Une lettre touchante, profonde.
Ce roman m’a captivé, totalement happé dans son univers fascinant.
J’ai mis très longtemps à trouver les mots pour retranscrire l’étrange, unique et
ensorcelante magie qu’a opérée ce texte sur ma jeune âme de lecteur, d’écrivain
et d’adolescent, mais les voici enfin ; fragiles, maladroits peut-être,
mais sincères.
Tant que nous sommes vivants, nous
courons vers demain
« Mais cela suffit à nous rappeler une chose
essentielle : le feu qui brûlait dans le ventre de nos fourneaux brûlait
encore dans nos veines. »
De sa plume brûlant d’une douceur palpitante, Anne-Laure Bondoux
éclaire ses personnages du souffle humain de l’espoir. Ce souffle regorgeant de
saveurs vécues, désirées et fantasmagoriques anime chaque Homme d’une force qui
rend possible l’impossible. Comment croyez-vous sinon qu’il arrive à se battre
jusqu’au bout de ses capacités ? Comment pourrait-il sinon braver les
obstacles, les chutes et les déceptions dans le seul optique d’un but à accomplir ?
Ce but qu’il s’est fixé, créé, érigé. Cet horizon.
« Nous aussi on va tomber. On aura des bosses et
des bleus. Mais on trouvera le bon équilibre. »
Les personnages de ce roman ont en eux le « principe
actif », comme le qualifie elle-même l’auteur, le feu, la force de
l’espoir. Ils accomplissent la quête de leurs désirs et d’eux-mêmes. Anne-Laure
Bondoux marie la simplicité des mots à une voix de conteuse qui jaillit de
ceux-ci et transforme la simple histoire d’une vie en un conte universel. Dans
un élan de rage et d’amour, Bo et Hama se précipitent fougueusement dans un
voyage libérateur et initiatique, dans une quête de bonheur et de qui ils sont.
L’un et l’autre s’arment de tout leur espoir et le ravivent de leur amour pour
ne pas perdre de vue l’horizon et, toujours, courir vers lui. Même quand ils
tombent, les rayons éblouissants de cet idéal brillent à travers la poussière
du chemin qui accueille leurs chutes et leurs pas. Dans les pires moments, dans
l’obscurité du présent, dans les à-coups et les rebondissements surprenants du
destin ; demain, comparé à aujourd’hui, semble toujours la promesse d’un
espoir éclot.
« Ils virent quarante fois le soleil se coucher.
Et les quarante levers de soleil furent autant de raisons d’espérer. »
Tant que nous sommes vivants, nous cherchons
notre hier
Comme l’illustraient Boulet et Pénélope Bagieu dans leur
bande-dessinée La page blanche,
comment se construire quand on n’a plus de passé ? Les méandres de nos
actes et de tout ce qui a été dit et vécu qui s’écoulent dans les bribes de nos
mémoires sont le socle parfois fragile mais toujours indispensable de qui nous
sommes et devenons. De plus, comme le roman Lecœur des louves de Stéphane Servant l’exprime si justement, la transmission
et le don transgénérationnel sont le signe évident du temps qui passe dans une
famille et l’unit.
« Il n’y a pas de fruit sans noyau. Nous avons
besoin de savoir d’où nous venons, n’est-ce pas ? »
Ce n’est pas pour rien que, malgré la force et l’espoir, les personnages
chutent, tombent, se blessent et se perdent. Il leur faut accepter leur passé.
Il leur faut partir à sa recherche. Il leur faut le comprendre. C’est pourquoi
cette histoire est au passé, comme la poignante voix de l’héritière de cette
famille, de l’héritière du conte familial.
Ce n’est pas pour rien que cette histoire prend la forme d’une boucle. Un
voyage, un aller, une errance hasardeuse et tortueuse. Les personnages qui
courent vers l’horizon avant de s’échouer … avant que d’autres prennent la
relève. Avant qu’il y ait un retour.
Tant que nous sommes vivants, l’un
et l’autre nous déchirent
« Bras ballants, nous restions paralysés face au vide.
Et dans ce vide qui enflait à l’intérieur de nous, la haine s’insinuait, pire
que la vermine au bord d’une plaie. Etait-ce notre faute ? Etait-ce notre
faute si nous avions peur ? Nostalgiques d’un temps idéal, nous voulions
le jour sans la nuit, le soleil sans l’ombre, la vie sans la mort, le désir
sans le risque, et Hama sans Bo. »
Nous sommes des êtres compliqués, souffrants souvent, difficiles. Des
êtres qui sont écartelés par leurs complexes, par leurs désirs. Le passé ;
et la souffrance, la nostalgie, la quiétude qu’il apporte se heurtent à
l’avenir ; et l’angoisse qu’il provoque, l’espoir, le désir. Il faut vivre
avec tout ça, savoir se défaire de l’un tout en se construisant dessus ;
savoir se lancer dans l’autre, sans avoir peur. Anne-Laure Bondoux marie tout
cela dans la simplicité de ses mots. Sa plume pourtant si douce porte en elle
la fougue d’une étincelle qui s’enflamme à la moindre braise. L’un et l’autre
forment un équilibre surprenant, improbable, mais poétique et superbe. Chaque
chapitre s’intitule selon deux antonymes qui rendent ceux-ci puissants,
intenses et déchirants.
Nous ne pourrons dire mieux que Nietzsche, lui qui écrivait à propos
des tourments humains : « Fais de ton chaos de forces une étoile
filante. »
Bo et Hama se perdent entre ces extrêmes. Ils s’accrochent l’un à
l’autre pour s’en sortir, ballotés entre tous ces points séparés par des infinis.
Ils ne s’en sortiront pas indemnes, mais sans aucun doute grandis, plus forts et
changés.
« Tu crois qu’il faut toujours perdre
une part de soi pour que la vie continue ? »
Tant
que nous sommes vivants est une danse. Une chorégraphie savamment
construite, qui porte la grâce et la beauté de l’être humain, comme ses
faiblesses et sa fragilité, une danse qui exprime dans une douceur apaisante
une fougue virevoltante, une danse portant le lecteur dans le tourbillon
émotionnel, profond et bouleversant d’une profusion de personnages dans
lesquels on ne s’égare jamais, dans lesquels on sait reconnaître les plus
grands, les plus touchants.
11 commentaires:
J'aimerai énormément découvrir ce livre !!
"Tout comme ses personnages, les mots d'Anne-Laure Bondoux sont vivants; les pages résonnent des battements de leur coeur." C'est la seule phrase à peu près claire que j'ai pu sortir sur ce roman... Ta chronique, tu as mis longtemps à l'écrire, mais au moins elle est à la hauteur du livre (contrairement à moi...). Il ne te reste plus qu'à lire les autres Bondoux ^^ Biz!
Une sublime chronique ! Tu donnes vraiment envie *-*
très, très beau roman et très beaux mots pour en parler !
Il est EXTRAORDINAIRE ♥
Joli :3
Merci !
Je vais aller lire la tienne !
MERCII ! :D :3
J'aime beaucoup les romans d'Anne-Laure Bondoux et je pense que celui-là ne fera pas exception !
Merci pour cette belle chronique.
Très belle chronique! Néanmoins, pour moi, ça n'a pas fonctionné... Je n'ai pas adhéré à l'univers, ni aux personnages, ni au message qu'ils essayaient de transmettre. Dommage!
Je n'aurais pas mieux dit... comment tu fais ? J'espère que tu aimeras la mienne, même si à côté de la tienne, elle en jette pas autant ! Tu as su dire en peu de mots tout ce qui fait de ce livre quelque de fort et d'unique, et tout cerner d'une manière incroyablement parfaite... woh.
J'ai terminé ce roman mardi soir et ... woah. Je pense que j'aurais beaucoup de mal à mettre des mots dessus. En tous cas, merci pour cette critique, c'est grâce à elle et à celle de ton frère, et au prix, que je me suis plongée dedans et c'est un véritable coup de coeur, merci encore. <3
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