Douce solitude

La semaine dernière, j'ai failli à l'une de mes résolutions, puisque le blog est resté solitaire, vierge de mes mots et donc des vôtres. Je n'ai pas eu trop de temps : j'ai fini un stage, fêté un évènement, pris du bon temps, justement. Et je n'en ai pas non plus vraiment eu l'envie. Plusieurs jours j'ai failli m'y mettre, me disant allez, je vais écrire sur le blog, ne pas faillir à cette résolution. Mais il y a eu des empêchements, ou des nouvelles, ou des mots qui sont tombés et l'envie n'était pas là. Mes doigts étaient solitaires sur le clavier, un peu déconnectés du coeur et de la tête.
Je n'allais pas à me forcer, ce n'est pas le but de ce blog.
Alors me revoilà, vous voyez, je ne suis pas parti longtemps, j'ai juste vécu un peu seul sans vous pendant quelques jours, comme cela nous arrive tous.

Et si je vous parle solitude et m'apprête à le faire tout le long d'un article, ce n'est pas par tristesse, lourde solitude, lamentations ou mal-être. Non, bien au contraire. C'est juste parce que c'est un thème qui me traverse en ce moment, de différentes façons, et que j'ai envie de lui offrir quelques lettres. Les voici.

La solitude elle s'est fait une petite place dans ma vie ce mois-ci. Parce qu'il y a eu un stage, des cours en suspens, des départs, des au revoir et des kilomètres mis entre des gens. Ça m'a fait un peu bizarre, oui, parce que je n'avais jamais vécu aussi longtemps seul. Mais vous le savez sans doute, la solitude, je ne lui connais pas de meilleure parade que l'occupation. Et moi, vous le savez sans doute, l'occupation, je sais la trouver. J'en parle d'ailleurs dans ma vidéo En ce moment, que vous avez beaucoup aimée. Vous me l'avez beaucoup dit, ça m'a beaucoup touché. J'aime goûter le temps dans l'encre, dans le noir d'une salle, dans les images d'une histoire, dans la musique, dans l'écriture et les tournages, dans votre compagnie ou celle de mes amis, de ma famille, des gens qui m'entourent.

Le noir d'une salle et les images, j'en ai beaucoup profité ce dernier mois. J'ai vu un amour éperdu, une fratrie désespérément accrochée à la vie et au vent, une enquête où tout tombe, des animaux qui rêvent en grand... et une jeune femme solitaire. Vous voyez de qui je parle ? Oui, je pense à Solange te parle. Cette YouTubeuse originale, touchante, intimiste, bizarre, absurde, rigolote, rassurante, qu'on aime... ou pas du tout. Moi, je l'aime, Solange. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que je vous en parle, je crois.

Elle vient de sortir un film. Il est n'est proposé que dans quelques salles françaises, c'est une petite production, une petite diffusion, un film court. Mais j'ai eu la chance de le voir à Bordeaux. J'ai été surpris. Tout en ne l'étant pas. Parce qu'on reconnaît Solange dedans : l'exigeante, l'originale, l'intimiste, l'absurde, la rigolote, la bizarre, la touchante, la rassurante. J'ai été ému et séduit. Mais suis un peu resté sur le bord aussi. Comme la pièce tordue, apaisante, intimidante et doucement jolie d'un appartement. On la regarde, on l'aime, mais on ne sait pas trop comment entrer, ni comment en sortir. Malgré tout, il continue à m'habiter, ce film. Maintenant. Maintenant et depuis que, sur mon vélo, la nuit, sous les étoiles et dans le froid, je l'ai laissé couler en moi juste après l'avoir vu. Juste avant de retourner à ma petite solitude momentanée.

La solitude de Solange et la mienne sont différentes, car la sienne est, le veut-elle, durable et la mienne momentanée et bien moindre. Mais sans doute m'y suis-je entraperçu. Sans doute ai-je pu toucher du doigt ce qu'elle nous dit : être seul fait autant de mal que de bien.

"Il faut sortir. Voir ses amis. Et attendre que ça revienne." dit Fauve dans une de ses chansons. C'est pourquoi j'ai fêté jeudi soir la St-Patrick et que j'ai bu des rires dans la nuit verte. C'est pour ça, aussi, que j'ai été flâner à l'autre bout de Bordeaux dans une bouquinerie hier, avec une amie. J'y ai déniché cet album, ce petit morceau de fraîcheur, de chaleur et de beauté :


"Autrefois, parmi les jonquilles du mois d'avril, on pouvait compter Papi et Pépé. Mais, depuis bien des années, leurs fourrures rose et bleue ne fleurissent plus les prés. Les souvenirs colorés remplissent mes idées, dansent et se cognent dans ma tête. Si bien que, parfois, je ne sais plus m'y retrouver."

Alors, le petit ours invente un jardin "aux couleurs de Papi et Pépé. Un endroit où souffler, respirer et se retrouver". Et je crois que c'est réussi. L'ours nous emmène du bout de la patte visiter ce jardins de souvenirs où fleurissent dans les herbes des bulles du passé. Il dessine des images. Des images qui vibrent sous des dessins à la minutie sans pareil et aux couleurs du passé. Des images qui naissent sous des mots simples et sincères. Des mots simples tissés les uns avec les autres pour former un texte d'une richesse, d'une sensibilité et d'une rareté précieuses. L'alchimie entre les deux est naturelle, elle transperce les yeux et le coeur. Et on a envie de faire de cet album notre petit jardin secret : un endroit où souffler, respirer et se retrouver.
Pour, finalement, faire comme l'ours. Garder au chaud tous nos souvenirs, où comme l'écrivait Solange, la perfection existe, garder au chaud sa solitude si confortable, garder au chaud sa tendresse et son amour. Et prendre le chemin de la vie et des autres.

" La vie et les autres l'attendaient dehors." Timothée de Fombelle, La Bulle (Gallimard jeunesse, 2015)

Alors voilà, alors qu'en partant pour le Salon du livre de Paris, je vais mettre fin à cette solitude momentanée ; je profite de ces derniers instants de calme, avant le retour d'un tourbillon de tout plein de choses. L'appartement est propre. Les fenêtres sont restées ouvertes toute l'après-midi. Le vent et le ciel bleu portent un froid parfum d'été. J'ai un plaid sur les épaules. J'ai mis ma playlist apaisante. J'ai lu des albums et je vous écris. Le soleil commence à descendre sur les toits.

Portez-vous bien.

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