Charlotte Bousquet et le féminisme

Aujourd'hui, c'est la journée internationale des droits des femmes. À cette occasion, il y a un grand projet qui a été lancé sur Booktube : le projet Féminibooks. Chaque jour, un Booktubeur publie une vidéo sur un ou des livre(s) qui ont trait au féminisme.
J'ai participé à ce projet le weekend dernier ! Je me suis invité sur la chaîne de Cassandra : Le Bonbon au Cassis pour vous parler d'un roman que nous avons lu en lecture commune et que nous avons tous les deux adoré : Là où tombent les anges de Charlotte Bousquet, publié dans la collection Électrogène de Gulf Stream.



Pour compléter notre vidéo, nous avons également envoyé quelques questions à Charlotte Bousquet qui a gentiment accepté d'y répondre. Alors les voici !


Les questions de Cassandra / Le Bonbon au Cassis :

Comme on a pu le remarquer, dans Là où tombent les anges, mais également dans d'autres de vos romans, comme Sang-de-lune, le thème du féminisme vous tient particulièrement à cœur. Qu'est-ce qui vous a poussé à vous intéresser au féminisme, à quel moment de vous vie cous êtes-vous considérée comme féministe ?

Je pense que je l’ai toujours été, sans nécessairement l’assumer. Adolescente et jeune adulte, je m’opposais à pas mal de normes sociales, sans toutefois avoir les armes ou le recul nécessaires pour me dire : « je suis féministe », etc. De plus, l’idée d’avoir une étiquette collée sur le dos me terrorisait (je n’aime toujours pas les étiquettes mais j’ai appris à faire avec). Le sexisme ordinaire m’agaçait « tu peux pas, t’es une fille », « les hommes sont plus intelligents/ forts/ capables de… que les femmes », et ce, dans tous les milieux, mais je n’avais pas envie d’approfondir (et puis, le web était quand même beaucoup moins développé…).
Les premiers déclics ont eu lieu avec l’écriture de Noire lagune (Gulf Stream) et du premier tome de L’Archipel des Numinées(Mnémos). Le second a été la rédaction de Précieuses, pas ridicules (Gulf Stream toujours), un documentaire sur le féminisme et les arts. En me rendant compte de la façon dont les femmes étaient purement et simplement effacées de l’histoire, de la création, des sciences, j’ai eu une sorte d’électrochoc. Et voilà…

En matière de féminisme, quels sont vos classiques absolus ? (livres, films, musique, tableaux, etc.)
Je botte en touche, pour cette question. Il y a énormément de références, d’essais, de romans, poèmes, etc. J’en cite quelques-uns, presque au hasard.

Une chambre à soi, de Virginia Woolf, Le guide des métiers pour les petites filles qui ne veulent pas finir princesses, de Catherine Dufour
Cuantos Piquetitos de Frida Kahlo et les portraits de Diane Arbus 
Wadjda, de Haifaa Al Mansour et Iron Jawed Angels de Katja von Garnier
Trio en ré mineur op 11 pour violon, violoncelle & piano de Fanny Mendelssohn et Bad Reputation de Joan Jett


D'après vous, de quelle manière la culture peut-elle permettre à notre société d'évoluer vers l'égalité ?
Question essentielle et complexe… D’abord, je crois que le web est d’une grande aide pour cela dans la mesure où il rend visible ce qui demeurait caché, inavouable, secret, etc. il y a quinze ans. Le féminisme existe via Internet, des personnalités comme Emma Watson avec HeForShe se battent pour un monde égal, des ONG dénoncent les injustices commises dans certains pays au nom du patriarcat, etc. D’un point de vue plus social, les violences envers les femmes sont enfin dénoncées – courts métrages, pétitions, prises de parole, témoignages – montrent la réalité et permettent une prise de conscience. Je crois que ça, c’est un grand pas en avant.
La culture, qu’il s’agisse de littérature, d’arts plastiques, de musique, de cinéma (ou séries), de bande-dessinées, et de photographie est essentielle à l’évolution du monde vers plus d’égalité, dans la mesure où – normalement – elle permet une ouverture et une réflexion sur l’autre, le monde, l’avenir… Une duologie comme La Symphonie des Abysses, de Carina Rozenfeld qui évoque différentes problématiques comme le genre ou le racisme, en est l’illustration parfaite.
Le problème, aujourd’hui, est selon moi politique avant tout : tant que l’éducation et la culture ne seront pas une priorité du gouvernement, on ne pourra pas progresser aussi rapidement qu’on le devrait vers une véritable société égalitaire. Et entre nous, ce n’est pas un hasard si les dictatures ont tout intérêt à étouffer les voix des artistes et museler l’éducation. Cela se fait de manière ouverte dans certains pays, dans d’autres ont fait passer ça avec une bonne dose de télévision et de malhonnêteté médiatique (importance du buzz, du scandale, de l’immédiat, etc.).

Mes questions / Le cahier de lecture de Nathan :

Si vous aviez vécu à l'époque de Là où tombent les anges, quel aurait été votre combat ? Celui de Solange ? Celui de Lili ? Celui des manifestantes ? Celui de Blanche ? ...
Voyons, avec mon Fabien à la guerre, mes chevaux réquisitionnés par l’armée… Une dépression, déjà. Ensuite, je me serais réfugiée chez mes parents et j’aurais écrit… au départ, de longs poèmes et des romans, ensuite j’imagine que je me serais penchée plus sérieusement sur le monde et que je me serais impliquée dans la politique à ma façon… littéraire.

Qu'est-ce qui est venu en premier pour écrire Là où tombent les anges : l'histoire ou le thème du féminisme ?
L’histoire de Solange… Qui au départ était celle de Lili… et aurait dû se passer en Argentine. En réalité, tout s’est construit ensemble : évoquer les femmes pendant la guerre, c’est venu pendant que je lisais de la documentation pour justifier la fuite de mon héroïne à Buenos Aires. Lili s’est effacée progressivement pour laisser place à Solange… et aux autres femmes du récit.

Quels sont les passages qui vous ont semblé le plus difficile à écrire ?
Tous ! Là où tombent les anges, je l’ai écrit à une période où j’avais énormément de doutes quant à ma carrière d’autrice (j’en ai toujours mais je me soigne J). Mes romans ne se « vendaient pas » (ou pas assez), selon certains éditeurs, j’étais trop « intello » (ce qui rejoint d’une certaine façon ma réponse à Cassandra… on vit dans un monde où pour certains, être intello est devenu une insulte).
Ce qu’il fallait, selon eux, c’était un roman avec une écriture blanche, si possible à la première personne pour faciliter l’identification de la lectrice (si, si…) et une intrigue suffisamment prenante pour provoquer un effet page-turner.
Et j’écoutais ces discours, je pensais à mon roman, à sa linéarité, son style, ses références. Et je me disais : « Merde, tu te plantes complètement, tu vas planter Électrogène, tu vas faire un bide… » J’ai failli arrêter aux alentours de 1915, je crois.
J’ai envoyé ce que j’avais déjà rédigé à Paola Grieco avec un SOS bien gratiné du genre : « cestnultenpensesquoijarrêtetoutjarrêtedécriredailleurs »…
Et j’ai reçu une réponse deux jours plus tard, qui m’a remis le pied à l’étrier. Du coup, la seconde partie a été bien plus facile à écrire, parce que plus apaisée.

En espérant que cette interview vous a plu, je vous invite très fortement à lire le roman de Charlotte Bousquet, qui a été un gros coup de coeur pour moi.
Là où tombent les anges, intello ? Peut-être . Page-turner ? Assurément !

Vous pouvez également visionner la version complète de ma participation à la vidéo de Cassandra :



À bientôt !
Portez-vous bien.
Nathan

3 commentaires:

Lebonbonaucassis a dit…

J’adore ses réponses !! C'est tellement sympa de sa part d'avoir accepté de participer !! :) ❤

Juliette Celle qui lit dans la nuit a dit…

Décidément, tu me donnes envie de le lire celui-là!!

0titi85 a dit…

J'avais bien aimé ce livre, même si j'ai un avis moins enthousiaste que toi.C'est toujours un plaisir de lire voir tes avis et les retours que les auteurs font.

Enregistrer un commentaire