Si je l'avais rencontrée rapidement en vrai c'est (encore !) par facebook que nous avons réellement fait connaissance ...
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C'est Véronique Durand, responsable du rayon ados que j'interroge aujourd'hui ... voici le texte en réponse à mes questions. Passionnée, passionnante et captivante, apprenez-en plus sur la librairie Mollat -plus grande librairie indépendante de France- la création du rayon ados, et sur les goûts et opinions de cette libraire !
Je suis libraire depuis 1986. J’ai fait
des études de lettres sans grande conviction je dois dire : je ne voulais
pas enseigner, je ne savais pas trop vers quoi m’orienter mais j’avais une
passion pour la littérature depuis toujours. J’ai entendu parler de la
formation aux Métiers du livre de l’IUT Michel de Montaigne à Bordeaux et donc,
deux ans plus tard, DUT en poche, j’ai commencé ma carrière dans une petite
librairie indépendante à Bordeaux (Mimésis, qui n’existe plus aujourd’hui) .
Je crois que l’on peut parler de vocation inconsciente puisque, en rangeant les
livres que j’avais enfant (et je n’en n’avais pas énormément, j’allais plutôt à
la bibliothèque), je me suis aperçue que tous étaient marqués d’un prix, écrit
de ma main au crayon à papier. Le souvenir enfoui est alors remonté dans
ma mémoire : j’avais (à quel âge, je ne sais pas), vendu des livres à mes
ours et à mes poupées…
Denis Mollat - (c) Laurent Theilet - photo Sud Ouest.fr |
En novembre 1989, on m’a proposé un
poste au rayon jeunesse (domaine que je ne connaissais pas vraiment puisque
Mimésis était plutôt spécialisée en Littérature générale et Sciences humaines).
Je me suis mise à lire frénétiquement albums et romans et j’ai découvert un
univers de création qui allait devenir pour moi une véritable passion. Je suis
restée 19 ans dans ce rayon jusqu’à ce que Denis Mollat me propose de créer un
espace ados/jeunes adultes au sein de la pochothèque.
interview du responsable de collection # |
L’idée de ce rayon est née il y a
à peu près six ans. Après le phénomène Harry Potter (succès auprès des jeunes
lecteurs mais aussi auprès d’un lectorat plus âgé, voire adulte) puis avec le
succès de la série de Stephenie Meyer, et dans un autre registre l’apparition
de collections comme Exprim’ chez Sarbacane nous ont poussés à nous interroger
sur l’emplacement de ces ouvrages à l’intérieur de la librairie. Nous avions à
proposer au rayon jeunesse des livres qui étaient destiné à un public (13-20
ans) qui ne venait que peu au rayon jeunesse, sauf poussé par les séries à très
gros succès qu’ils étaient d’ailleurs étonnés de trouver dans un espace trop
connoté « enfant ». Les ados étaient pourtant bien dans la librairie
mais plutôt dans l’espace BD ou au rayon poche pour les prescriptions scolaires
ou des lectures personnelles qu’ils avaient un peu de mal à choisir face à
l’abondance de l’offre. C’est donc un constat, une simple observation de
l’évolution de l’offre éditoriale et des pratiques des lecteurs qui a nourri
cette réflexion qui s’est concrétisée par un déménagement partiel du fonds
jeunesse vers la pochothèque. Nous venons de rendre ce projet encore plus
cohérent en accueillant dans le même espace le rayon SF et fantasy adulte. La
circulation se fait donc maintenant plus naturellement entre littérature
générale en poche, littérature ados, littératures de genre et collections
para-scolaires. L’idée étant aussi que les adultes puissent aller sans complexe
vers la littérature dite pour ados et que les frontières artificielles liées à
l’âge du lecteur se gomment. Il a fallu choisir quels romans estampillés
jeunesse allaient rejoindre le secteur ado et ce ne fut pas sans hésitations.
Entre connaissance du fonds et diplomatie, il a fallu trancher parfois dans la
douleur ! Nous avons tenté de préserver la cohérence pour que chacun s’y
retrouve mais bien évidemment, suivant les demandes et l’appétit de lecture des
uns et des autres, il y a des moments où l’on peut être sur les deux rayons à
la fois, un peu à la frontière. C’est aussi le rôle du libraire que de savoir
guider, accompagner et …sourire !
source |
La librairie Mollat est la plus
grande librairie indépendante de France avec une superficie de 2500 m2 ,
une centaine d’employés (une cinquantaine de libraires). Située au cœur de
Bordeaux, elle se compose de différents espaces sur un seul niveau, en
rez-de-chaussée, ce qui donne l’impression d’avoir une succession de librairies
thématiques qui forment un labyrinthe où l’on peut flâner d’une ambiance à
l’autre. Une vague de déménagement qui vient de s’achever permet regrouper trois grands secteurs : le savoir
(livres scolaires, scientifiques, juridiques, Sciences humaines, Histoire,…),
l’image (Beaux-livres, architecture, design, graphisme, BD, Jeunesse, Art de
vivre, tourisme, et fiction (Littérature, ados, littératures de genre et
poches).
Si la librairie ne s’étend pas
physiquement pour l’instant, elle s’étend d’une autre façon via le site
internet qui est un site marchand et aussi un site riche en informations (les
coups de cœur des libraires par domaine, dossiers thématiques, blog ados et
blog littérature, vidéos et podcast des conférences viennent l’animer
constamment). Que l’on soit bordelais ou pas, on peut donc se promener chez
Mollat, en chair ou en os ou, d’une façon virtuelle via Mollat.com : la
librairie est ainsi présente via le site sur les cinq continents et soufflera
120 bougies en 2016 !
Mes goûts en matière de
lecture ? Vaste question ! Je vais en oublier ! J’ai découvert
la littérature ados, en tant que libraire, par le catalogue de l’Ecole des
loisirs qui était l’un des rare (à la fin des années 80) à avoir choisi d’éditer
des auteurs contemporains. Il y avait aussi la collection Travelling chez
Casterman, la bibliothèque de l’amitié chez Hatier ou encore la bibliothèque
internationale chez Nathan mais bref, les auteurs qui m’ont marquée à ce moment
là étaient Marie-Aude Murail, Judy Blume, Robert Cormier (exceptionnel !),
Susie Morgenstern, Xavier Laurent-Petit, Loïs Lowry, Christian
Lehmann…Ah ! No pasaran, le jeu !
Il y a des maisons d’édition dont
je me sens plus proche : ce que propose le catalogue Doado du Rouergue
m’enthousiasme et ce, depuis le premier titre Cité nique le ciel de
Guillaume Guéraud. Dix romans plus tard, Guéraud fait toujours partie des
auteurs que je suis avec une fidélité quasi aveugle ! La naissance
d’Exprim’ a amené une vraie révolution en édition jeunes-adultes : Insa
Sané a été une vraie claque et je suis le catalogue avec attention. C’est un
éditeur qui prend des risques, ose l’originalité de ton et réveille un panorama
éditorial parfois très sage à destination d’un public qui est en âge de ne pas
l’être ! Chez Gallimard, Timothée de Fombelle bien sûr qui a ce talent
rare de tout vous faire oublier même quand le livre est refermé ! J’ai
aussi adoré La série de Cornelia Funke, Sang d’encre ou encore celle de Philip
Pullman La malédiction du rubis. Faire le mort (Thierry Magnier)
du suédois Stephan Casta a aussi été un grand choc de ces dernières années,
mais aussi La trilogie de Patrick Ness, La voix du couteau (Gallimard), Delirium
de Lauren Oliver ou Kabylie Twist de Lilian Bathelot et tant
d’autres ! Jean-Luc Marcastel, Mikaël Ollivier, Pauline Alphen…J’essaie de
lire trois /quatre romans par semaine donc, depuis plus de 20 ans, je n’ose pas
faire le calcul ! Toutes mes lectures n’ont pas été étourdissantes bien
sûr mais ce métier à cela de vertigineux que l’on mesure au quotidien l’abondance de l’offre de lecture tout en
étant conscient de ne jamais pouvoir en faire le tour : un métier de
gourmandise et de frustration…
Mes lectures personnelles (mais
est-ce que ça existe encore quand votre loisir principal est lié aussi
intimement à votre métier ?) vont souvent vers la littérature
anglo-saxonne. J’avoue un faible pour la littérature victorienne (Dickens,
Gaskell, Wilkie Collins…) ou plus près de nous pour Thomas Hardy ce qui ne m’empêche
pas d’adorer la littérature américaine (London, Selby, Oates, Kasischke,
Brautigan, Franzen…)
L’exercice est difficile, il
faudrait que je sois devant ma bibliothèque pour que mes vieux amis me sautent
aux yeux…Le top 3 serait : Oblomov de Gontcharov, Martin Eden de Jack
London et Les grandes espérances de Charles Dickens. Classique, certes, mais ce
sont des livres qui ont compté et comptent encore pour moi.
L’univers des blogs m’intéresse
bien sûr mais je n’en suis que quelques uns (notamment ceux de trois cousins…).
Lire les chroniques des autres c’est bien (bien qu’il y ait à boire et à manger
sur le net) mais prend trop de temps : de lien en lien, les heures que
l’on peut y passer auraient au final été mieux utilisées à lire un roman.
Pareil pour facebook qui est quand même un fabuleux outil de partage de
l’information : je pratique, je lis, mais avec modération…Parce que la
lecture sur papier, c’est sans modération du tout ! D’ailleurs, j’y
retourne…Merci Nathan !
1 commentaires:
Une super interview, ça donne envie de découvrir la librairie Mollat, en tout cas ! D'ailleurs, je file sur leur site !
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