La mer : 5 romans pour adolescents qui sentent l'iode et l'océan

« Et la mer et l'amour ont l'amer pour partage. »
Je ne commence pas cet article par une citation de poème pour faire un retour sur ce blog en frimant, mais parce que c'est la première phrase qui me vient quand je pense à la mer, étrange réminiscence de mes cours de français au lycée. Certaines phrases ont la peau dure. Et celle-ci, avec l'amour, l'amer et la mer, me permet d'introduire dans un rythme marin le thème de cet article. Oui, aujourd'hui, en l'honneur de la parution de La dernière marée, le premier roman d'Aylin Manço publié par Talents Hauts, nous allons prendre la mer. (Même si tout le monde sait très bien que c'est pas l'homme qui prend la mer, c'est la mer qui prend l'homme...)
Je vous ai choisi quelques romans pour adolescents qui sont tous aussi délicieux que l'odeur vive et douce de l'océan : un étonnant mélange d'iode... et de vase.


(c) Le Cahier de Lecture de Nathan

Le goût du sel : La dernière marée d'Aylin Manço


Tout juste paru chez Talents Hauts, La dernière marée est un roman aussi doux que tempétueux, dont les phrases fluides - oserais-je écrire aquatiques ? - envoûtent le lecteur et le brisent. Préparez-vous à plonger dans une mer en apparence calme et pourtant dangereuse.
Cette année, à Citéplage, là où devrait se trouver la mer, il n'y a que du sable et des rochers. Depuis des mois, la mer reflue, aspirée sans fin et sans cause connue. Dans cette cité balnéaire totalement vide, où les tortues s'échouent de désespoir, Élo tente de faire comme si rien n'avait changé. Mais sa relation naissante avec Hugo, le repli de sa mère et l'attitude ambiguë de son père la poussent à s'affranchir des attentes maternelles.
La mer est multiple dans l'histoire d'Élo.
C'est d'abord un décor. Un paysage marin inquiétant pour un roman qui, finalement, est un livre d'imaginaire. Nous sommes dans un monde en apparence semblable au nôtre, à une différence fondamentale près : c'est (peut-être ?) la fin du monde. La mer reflue. Elle recule. Plus de marées, plus de plages bondées, plus de coquillages et d'algues échoués le temps d'un tour de cadran, mais une faune qui attend la mort, plus de poissonneries ouvertes, plus de stations balnéaires florissantes... La mer recule pour une raison inconnu, et face à ce Reflux effrayant, on ne sait comme réagir, si ce n'est par la peur ou l'indifférence. Mais cet enjeu post-apocalyptique n'est qu'un décor. Un prétexte. Une ambiance. Une atmosphère tout aussi inquiétante que poétique.
C'est ensuite une métaphore. Celle du mal-être dans lequel Élo voit sa mère s'enfoncer. À mesure que la mer recule, un repli s'effectue aussi chez la figure maternelle. Une figure de force, héroïque, puissante. Elle qui a traversé la mer à la nage. Qui, avec toute l'ambition qu'elle porte, tire en avant sa fille depuis des années. Mais elle n'est plus qu'une ombre faible accrochée à la radio qui déverse dans l'appartement de location les nouvelles du Reflux.
C'est un espoir, enfin. Un espoir ou un désespoir où Élo et Hugo, son nouvel ami, plongent pour oublier leur quotidien. Ils ne savent plus vraiment ce qu'ils doivent voir dans les plis des vagues et l'immensité de l'océan : une échappée ou une menace ? un monde de possibles ou de dangers ?
« Quand je bordais le foc, j'ai tout senti, le vent et le bateau. C'était comme si j'avais disparu mais que je faisais partie de tout le reste. »
C'est dans toute cette richesse qu'Aylin Manço raconte l'adolescence. Un monde qui prend fin pour en ouvrir un autre, avec douleur, poésie et espoir. Un repli dans lequel tous les repères s'effondrent, dans lequel il faut construire quelque chose d'autre. Une poignée salvatrice de rêves d'aventure et d'amour.
Elle signe un premier roman assuré. Il porte en lui tout à la fois les ingrédients d'un bon roman pour adolescents - avec les nombreuses qualités mais aussi quelques (rares) lieux communs qui vont avec - et l'inattendu d'une jeune autrice qui a encore du talent à revendre. Écrit avec maîtrise et élan, c'est un roman aussi vif, rassurant et mordant que le goût du sel.

Le souffle du vent : l'aventure à la Michael Morpurgo

J'ai une histoire particulière avec chacun de ces deux romans signés par un grand auteur britannique de littérature jeunesse, j'ai nommé Michael Morpurgo.
J'ai découvert le premier, Le royaume de Kensuké, car ma mère nous l'a lu à haute voix, à mon jumeau Tom et mon amie d'enfance Armelle, alors que nous étions enfants et choisissions un roman tous les hivers pour nos vacances à la montagne. Les souvenirs que j'en garde sont quasi inexistants. Une couverture bleu comme la mer, découpée en bas pour laisser apercevoir le personnage finement et tendrement dessiné par François Place. Une lecture quotidienne à haute voix pour se laisser happer par un univers littéraire passionnant. Un naufrage, une aventure. Un souvenir de lecture et d'enfance qui fonde des choses, à commencer par l'amitié. Et l'amour de lire et de partager.
Le 28 juillet 1988, Michael embarque avec ses parents et leur chienne, Stella, sur un voilier pour faire le tour du monde. Ils s'arrêtent, parfois, pour de fabuleuses escales, Afrique, Amérique, Australie, jusqu'au jour où survient un terrible accident. Le jeune homme se retrouve échoué, avec sa chienne, sur une île déserte perdue au milieu du Pacifique. Va-t-il pouvoir survivre, affamé, menacé par toutes sortes de dangers? Reverra-t-il jamais ses parents?
Un matin, alors que l'épuisement le gagne, Michael trouve auprès de lui un peu de nourriture et d'eau douce. Il n'est pas seul...
Le récit bouleversant d'une aventure hors du commun et d'une amitié inoubliable.
Il rencontreras un homme Kensuké.
J'ai découvert Seul sur la mer immense en bibliothèque. La couverture et le nom de l'auteur, sans doute, m'auront attiré. Seul sur la mer immense est ce genre de romans que je meurs d'envie de relire tout en le craignant. Et s'il n'était pas à la hauteur de mes souvenirs ? Car Seul sur la mer immense est de ces romans justement immenses et importants qui laissent en nous non pas des souvenirs et des bribes d'histoire, mais des émotions et des sensations. La grandeur, la douleur, l'aventure, le va-et-vient des vagues, une famille, des déchirements, l'amour, des départs, des histoires, la vie et la mort, voilà tout ce qui, je crois, me revient en écrivant ces mots sans avoir lu l'ombre d'un résumé.
En 1947, le tout jeune Arthur est embarqué, comme des milliers d'autres orphelins, sur un bateau à destination de l'Australie. Il ne sait pas encore qu'il ne reverra pas sa soeur ni sa terre natale anglaise. Désormais sa vie entière se fera là-bas, jalonnée d'épreuves mais aussi illuminée par la rencontre de personnages extraordinaires et par sa passion de la mer.
Bien des années plus tard, Allie, la fille d'Arthur, quitte la Tasmanie, au sud de l'Australie, à bord de son bateau. Elle s'apprête à accomplir une formidable traversée en solitaire. Son but : franchir les océans pour gagner l'Angleterre, dans l'espoir de retrouver sa tante Kitty, la soeur de son père.
Un voyage de l'enfance vers la maturité, deux destinées, deux récits, un roman bouleversant.
Peut-être, un jour, sauterais-je le pas pour replonger dans ces grandes histoires. En attendant, je garde précieusement ces souvenirs de lecture qui ont la force du vent.

La puissance des tempêtes : Le Worldshaker de Richard Harland

J'ai découvert Le Worldshaker il y a de longues années (au moins 6 ans quand même !) et ce roman (cette série !) entre un peu dans la même catégorie que Seul sur la mer immense, c'est-à-dire que j'en garde une flopée de souvenirs colorés, vifs, uniques, émouvants, forts. La différence, c'est que j'en conserve aussi nombre d'images, et ce, je pense, pour deux raisons. La première, c'est que j'avais travaillé dessus en consacrant à ce roman un tiers de mon TPE sur les dystopies (décidément, cet article est plein de souvenirs du lycée !). La seconde, c'est que j'avais interviewé l'auteur au Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil ! Vous pouvez même redécouvrir ce fabuleux moment (ouf, la photo gros dossier semble avoir disparu du blog...).
Dans Le Worldshaker, les Hommes résident... sur la mer. Les terres étant devenues invivables, des pays entiers vivent désormais sur d'immenses bateaux qui arpentent les océans à la force de machines monstrueuses. Dès le début, j'ai été fasciné par ces vaisseaux-mondes à l'esthétique steampunk qui libèrent l'imaginaire et qui sont une incarnation symbolique de nos sociétés actuelles. Sur ces bateaux, les classes sociales se répartissent les ponts du plus haut (à l'air libre) aux plus bas (les machines)...
Et qui dit dystopie, dit révolution... Alors prenez un océan fougueux, mettez-y le feu, ajoutez une puissance imaginaire complètement hypnotique et vous avez un roman hors du commun : Le Worldshaker.

L'embrun des vagues : Cheval océan de Stéphane Servant

À la croisée d'une vague et d'un cri, un peu comme La dernière marée où la mer est métaphore, Cheval Océan est un bijou littéraire de la collection d'une seule voix, qui publie des textes courts qui peuvent se lire d'un seul souffle. Ce récit époustouflant signé Stéphane Servant est un véritable coup de poing. Pour le (re)découvrir, je vous propose un extrait de ma critique, paru il y a 5 ans (!).
« Ce sont les mots d’Angela qui est devant cet océan, sur cette plage du Portugal, qui pense à sa grand-mère et parle à cet être pour qui elle a toute cette amertume. Mais la voix d’Angela devient l’écho puissant et infini de l’Océan. Son écume comme des larmes de sel, son rugissement comme le torrent des tourments, sa force comme celle de la rage. La voix d’Angela devient celle de toutes ces femmes blessées, ces femmes d’hier et d’aujourd’hui, ces femmes de demain. La voix d’Angela retranscrit avec beaucoup d’émotion son histoire et ce tsunami de lettres inonde le lecteur pour le laisser, après une petite heure de pure intensité, au bord de l’eau, chamboulé. »

Pour les Franciliens et Parisiens, je serai ce soir au lancement du roman, en présence d'Aylin Manço et de l'équipe de Talents Hauts, à la librairie des Nouveautés. Plus d'infos par ici. Viendez, les copains !


Pour retrouver tout le Blogtour La dernière marée, suivez le guide !
16.01 • La chronique gourmande de Cook in Book
17.01 • La vidéo (avec Clémentine Beauvais herself !) de Talents Hauts
18.01 • La critique de L'Oiseau Lit
19.01 • La vidéo de la chouette Piko Books
20.01 • La critique de la géniale Allez vous faire
21.01 • La vidéo gourmande de Boitamo
22.01 • La critique de l'incontournable Sophie Lit
Demain, rendez-vous sur le blog de La Ronde des Livres et vendredi sur celui de La Mare Aux Mots !

Et vous, quels sont vos romans maritimes préférés ?

3 commentaires:

Pr River a dit…

Coucou toi x)
Bon La Dernière Marée <3
Pour les Morpurgo, je les ai lus d'un point de vue prof (du coup des fois ça change un peu, comme quand je vais au théâre avec les élèves)... Je me souviens avoir beaucoup aimé le Royaume de Kensuké, mais être déçue par Seul sur la mer immense, tout simplement parce que comme toi, la couverture m'avait beaucoup tentée maiiiiiis, il passe peu de temps sur la mer le garçon, finalement. Du coup, même si l'intrigue était bien menée, son découpage en deux et son peu de temps sur l'eau m'avait un peu laissée sur ma faim... Après, il écrit bien le bougre :).

Pas lu le 4e et Cheval Océan m'a laissée un peu là, aussi. Il faudrait que je le relise à l'occasion. (Oh ce coup de flemme pour parler des livres).

Dans un tout autre registre, j'avais adoré lire Les Aventuriers de La mer, de Robin Hobb, qui m'avait procuré de beaux rêves sur l'océan et les bateaux. Des pirates, des bateaux magiques, des tempêtes... Je n'ose pas les relire, mais je me souviens du plaisir à les dévorer (presque plus que l'Assassin Royal pour le coup).

Je crois que c'est tout. J'en ai lu peu, mais je crois que j'adore les romans avec l'eau hihi.

Bon retour ;)

Nathan a dit…

@Pr River : Ouh là, tu vois, j'ai oublié Seul sur la mer immense, et ne peux donc pas trop répondre à ton avis x)
Ah j'ai ce Robin Hobb dans ma PAl depuis trop longtemps...
Merci pour ton commentaire ♥

Anonyme a dit…

Ils ont l'air bien...

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